12 novembre 2019

Pour approfondir sur le développement psychomoteur

Voici quelques repères sur le développement psychomoteur et l’acquisition du geste graphique chez l’enfant :

DEVELOPPEMENT DU GESTE GRAPHIQUE CHEZ L’ENFANT

Sur le plan développemental le psychomotricien s’attache à comprendre :

  • Comment l’espace de préhension s’est construit
  • Le lien entre le côté droit et le côté gauche du corps
  • La coopération entre les 2 mains
  • La coordination entre la vision périphérique et la vision focale

1 ère étape : Construction de la coordination entre vision périphérique et vision focale

Le premier schème que le nourrisson provoque est l’extension. Elle correspond à la recherche d’un contact extérieur enveloppant, comme l’était l’utérus, et participe à la construction de l’arrière-fond. Parallèlement, le bébé découvre la flexion, qui lui donne la possibilité de s’enrouler, de se rassembler sur lui-même, de se sentir contenu, puis d’explorer le devant Par ce jeu de flexion/extension du bébé se forme la coordination entre l’avant et l’arrière du corps. Cette coordination associée à l’intense jeu relationnel qui s’instaure avec les parents du bébé (rythmicités sonores, tactiles et kinesthésiques) aboutit à la création de l’arrière-fond .La notion d’arrière- fond assurée par différents appuis dont les portages, va permettre à la coordination entre vision focale et périphérique de se mettre en place vers trois mois. Le regard va alors pouvoir alterner entre accrochage et exploration.

2 ème étape : La construction des postures asymétriques

La tenue de la tête étant acquise, le développement psychomoteur va se poursuivre selon les règles :

  • Céphalo-caudale : le tonus musculaire augmente en premier au niveau de la tête puis progressivement jusqu’au bas du dos pour une tenue progressive du buste
  • Proximo-distale : le tonus musculaire baisse en premier au niveau des articulations des épaules et des hanches pour progressivement s’assouplir aux extrémités des membres (mains
    et pieds) ce qui permet de développer les mouvements fins.

Il peut arriver que l’enfant ne parvienne à élaborer le torse et les mains comme des instruments pour comprendre et agir sur le monde. On observe alors un clivage droite/gauche.

Dans ce cas le petit éprouve toujours la nécessité de se rassembler pour trouver des appuis, ce qui limite fortement d’autres activités. Les mouvements de coopération entre les deux mains sont difficiles entraînant des difficultés de coordination, des troubles praxiques des membres supérieurs, des troubles graphomoteurs. La dominance latérale ne peut se mettre en place.

A ce stade, il est donc important de ne pas assoir l’enfant qui ne s’assoit pas de lui-même. L’enfant serait alors dans un tonus pneumatique, dans une « lutte anti-gravitaire » qui l’empêcherait de développer son tonus musculaire et les postures asymétriques. La meilleure façon de développer sa posture est de jouer allongé.

3 ème étape : la construction de l’espace

Au début existent deux espaces droit et gauche. Par exemple, si on présente un objet à droite puis à gauche de l’enfant, il va le « redécouvrir » une deuxième fois. C’est par le relais par la bouche que va se construire la permanence de l’objet. Quand tout est relié, le croisement de l’axe du corps peut se mettre en place puis la latéralité.

PASSAGE DU GESTE A LA TRACE

En soutenant le développement psychomoteur par une intervention précoce, le psychomotricien va également soutenir le geste graphomoteur en permettant le passage du geste à la trace.

  • Vers 12/18 mois apparaissent les premiers tracés : ils sont la projection du mouvement dans l’espace graphique, L’enfant utilise le plan de symétrie du corps(espace droit avec main droite, espace gauche avec main gauche)C’est un plaisir musculaire en même temps qu’un plaisir à laisser une trace. C’est aussi un enjeu dans les échanges avec l’entourage (l’enfant s’y sent valorisé ou pas). Cela instaure aussi un espace transitionnel entre lui et l’autre articulé autour de la trace et du regard…
  • Vers 2 ans apparaissent les premiers tracés réalisés avec les doigts. La prise du crayon à pleine paume devient en effet plus digitale et les tracés se précisent : les courbes utilisent la rotation de la main autour du poignet. L’activité graphomotrice nécessite un support neuromoteur efficace mais aussi des conditions posturales et d’installation pour permettre un passage du geste à la trace qui soit optimal.

1er temps : le geste nécessite de trouver des points d’appui.

Les praxies ne peuvent se construire que si les points d’appui (ceux-ci sont à la fois physiques, émotionnels et psychiques) sont intégrés par l’enfant. Les postures sont les premiers points d’appui. Elles préparent le mouvement. En situation de dessin et d’écriture, en position assise :

  • Les pieds doivent être en contact avec le sol.
  • Au niveau du bassin l’appui dominant doit être du côté opposé à la main qui écrit.
  • Cette asymétrie de l’appui se reporte également sur le buste et les membres supérieurs. La main qui n’écrit pas assure le maintien et le positionnement de la feuille. Cela permet à la main qui écrit de ne pas s’appuyer sur l’outil scripteur, offrant ainsi la possibilité d’un geste fluide qui ne casse pas la mine du crayon ou perce le papier… Cette zone où le dessin et l’écriture peuvent se dérouler de manière fluide est relativement réduite, on parle de zone optimale d’écriture et de dessin (Bullinger, 2003).

Une grande partie du contrôle de ce geste graphique est assurée par le système visuel périphérique. Ce système central périphérique assure d’une part la régulation tonico-posturale de l’appui et, d’autre part, la dynamique du geste. Il faut donc une bonne coordination entre les 2 visions pour la poursuite visuelle et un bon équilibre entre tonus et posture.

2ème temps : L’analyse de la trace. Elle se fait par un traitement de type fovéal. C’est le traitement de « l’effet spatial du geste ». Cela suppose que le système visuel est capable de traiter les relations spatiales, de se déplacer de fixation en fixation par une suite de saccades en fonction d’un projet. Cette prise en compte de la spatialité permet de contrôler les traces réalisées mais pas de contrôler le geste lui-même. Pour que les fonctions d’exploration et d’analyse d’image soient possibles, il faut que l’ensemble des régulations posturales soient en place.

L’enfant en situation d’écriture ou de dessin doit donc coordonner ces deux composantes : le contrôle du geste et son effet spatial.

  • Vers 2 ans ½ : L’enfant va pouvoir donner du sens à ce qu’il produit (bonhomme, animal…) même si la dénomination arrive après. La trace devient le but de l’activité graphique, l’intention de figuration précède le tracé.
  • Vers 3/4 ans : Les figurations sont volontaires, ce sont les premières ébauches du bonhomme.
  • 5 ans : C’est l’âge charnière où on demande à l’enfant de quitter le registre de la figuration pour passer à un système symbolique de représentation : les signes de l’écriture. Tout le temps de la scolarité primaire sera nécessaire à l’enfant pour accéder à une écriture accomplie dans sa forme et son geste.
  • 6 ans : Le bras se déplace globalement en une translation latérale à partir de l’épaule : le mouvement du bras pour la progression sur la ligne est encore mal coordonné au mouvement des doigts pour l’écriture des lettres : cela se fait par à coups.
  • 8/9 ans : L’enfant s’applique à la liaison des lettres entre elles. Il y a un mouvement de rotation de la main autour du poignet. Ainsi devient possible le glissement continu du tracé et donc enchaînement des lettres…
  • 10/12 ans : Le geste devient beaucoup plus périphérique : le point de rotation du bras est le coude et non plus l’épaule… L’écriture devient plus automatique, rapide et personnelle.